Les règles pour participer à la Mini-Transat
2001 ont été renforcées suite aux problèmes
rencontrés lors de la dernière participation
(8 bateaux avaient été secourus dans le golfe
de Gascogne). Ainsi, les coureurs devront parcourir avec leur
bateau 1000 milles en course du calendrier Mini, en solo ou
en double ainsi que 1000 milles en solitaire sur un parcours
défini par la classe. Cest ce deuxième
parcours quHervé vient dachever alors quil
ne possède son bateau que depuis 17 jours !
Il aura mis pratiquement 10 jours soit du 12 au 22 juillet,
pour accomplir le parcours imposé qui la mené
de Port Kernevel (près de Lorient) en direction du
Sud pour contourner lIle de Ré, près de
la Rochelle, et ensuite remonter vers lIrlande pour
aller contourner le bateau phare de Conningbeg, au sud de
lIrlande.
Les conditions météos quil a rencontrées
nétaient pas de tout repos, étant donné
quil a pratiquement passé 8 jours au près
(position la moins confortable) dans des vents variant de
la pétole à Force 8. Il est rentré avec
4 kg en moins, mais une étincelle dans les yeux ! Pas
de doute, malgré la difficulté de lépreuve,
il a aimé ça et il va continuer !
Pour revivre un peu plus précisément cette aventure
, voici des extraits du livre de bord dHervé
quil a lui même commenté :
Lundi 10 juillet 2000
La météo ne se calme pas. Un coup
de vent force 6-7 souffle toujours. Yann Jameson , lancien
propriétaire de Children Action, arrive sur Pen Duick
(il a naviqué pendant deux ans et demi avec Tabarly
sur Pen Duick , le vrai de vrai). On fait encore un ou deux
travaux tels que le remplacement des couilles de chat, de
la drisse de génois, des élastiques qui tiennent
le pataras etc. Les gros soucis sont en fait les pilotes car
jai sur le bateau deux pilotes autohelm 4000 et 6000
avec gyropilote qui doit me permettre de barrer au mieux en
analysant lassiette du bateau. Les deux pilotes ont
un vérin mécanique avec un petit moteur électrique
et un des deux vérins a le moteur électrique
déjà grillé et le deuxième donne
de sérieux signes de fatigue. Ce nest donc pas
possible de partir pour les 1000 milles dans ces conditions.
Yann a commandé deux moteurs électriques qui
ne sont pas toujours arrivés. Je décide donc
den commander au moins un chez USHIP et il faudra donc
attendre larrivée de ce moteur électrique
pour pouvoir partir.
Mardi 11 juillet 2000
Coup de théâtre. Les pêcheurs
de Lorient, afin de protester contre la hausse du prix du
gasoil, bloquent tous les ports de plaisance de Lorient, y
compris le nôtre. Ils ont mis des chalutiers à
lentrée et ont tiré des câbles en
travers de lentrée. On ne sait pas pour combien
de temps va durer ce blocus et cest un peu stressant
car je me dis que ca pourrait bien retarder mon départ
pour les 1000 milles. Je vais faire les courses au supermarché
pour les 10 jours. Je me fais un menu que jespère
équilibré, par exemple crêpes au surimi
et miettes de thon à la tomate, couscous et thon à
la catalane, hachis et nouilles asiatiques. Mais on verra
plus tard que ces menus seront très difficiles à
suivre.
Lintérieur du bateau est très bien agencé.
Sur lavant, il y a une cabine double où en fait
je mets toutes les voiles et de chaque côté une
couchette et des équipets avec des jerrycans qui sont
soit remplis deau (pour faire ballast) soit il y a une
trappe sur le côté et on peut mettre toute la
nourriture. Jai un Jerrycan de nourriture salée
(boite de thon, jambon, poulet ), un jerrycan de biscottes,
crêpes, cornflakes et un jerrycan, le plus important,
avec le chocolat, les biscuits, les compotes de fruits et
le pain dépices.
Mercredi 12 juillet 2000
Je reçois finalement le moteur électrique
du vérin du pilote. Il faut souder le moteur sur
les fils électriques. On me donne un coup de main
car je navais pas le bon matériel. Le hors-bord
ne marche toujours pas même si quelquun a
passé deux ou trois heures dessus, rien ny
fait. Je vais donc partir sans moteur.
Je vais faire signer mon livre de bord à la capitainerie
et leur signaler que je pars. Je leur laisse une photocopie
du parcours. Je pars à 15 heures 45 de Port Kernevel.
Je décide de partir en direction de la Rochelle
dabord, pour faire le tour de lIle de Ré,
avant de remonter vers lIrlande, lidée
étant daccrocher au passage en remontant
une équipe dautres Pogos qui partent faire
le tour de qualification le vendredi après-midi
en direction de lIrlande. Les conditions météo
sont assez bonnes mais le vent est relativement bien établi,
vent de Ouest Nord-Ouest force 4 à 5. Je pars donc
sous grande-voile seule pour descendre le chenal de Lorient
et ensuite je décide de dérouler le gennaker.
La première marque à virer est le plateau
de Rochebonne au large de lIle de Ré et je
pars donc au cap sud-sud-est. Le vent se renforçant
je décide denrouler mon gennaker pour mettre
le génois médium. Malheureusement, je ne
maîtrise pas encore la manoeuvre, je nenroule
pas assez vite et le point damure du gennaker se
casse . Je dois donc le rentrer, non roulé, en
catastrophe dans le bateau. Vous pouvez donc imaginer
un geenaker de 40 m2 à lintérieur
dun bateau de 6,50 m. Il ne reste pas beaucoup despace
de libre. Je continue donc toute la nuit sous génois
médium. Le bateau file.
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Jeudi 13 juillet 2000
A 9 heures 20 je passe la première bouée
cardinale nord-ouest du plateau de Rochebonne, premier passage
obligé du parcours de 1000 milles. Après 24
heures jai fait 155 milles et le bateau au portant est
un régal même sil faut beaucoup barrer
car les pilotes ont du mal à tenir le bateau avec les
vagues qui arrivent de travers. Je fais une pointe en surfant
à 12.7 noeuds, et jarrive en fin daprès-midi
en vue de lile de Ré. La visibilité nest
pas très bonne, il y a de la brume, il ne fait pas
très beau et ces premières 24 heures ont été
difficiles. Jai dormi 3 ou 4 fois 20 ou 30 minutes.
Je ne suis pas amariné et jai un peu la nausée,
le mal de mer. Le fait de partir comme ça pour 1000
milles sur ce parcours difficile sans avoir trop de préparation
et ajouter à cela le fait de ne pas avoir vu Muriel
et les enfants depuis déjà une bonne semaine
rendent ces premières 24 heures difficiles.
Vers 19 heures, je passe sous le pont qui relie La Rochelle
à lile de Ré. Le vent est de nouveau bien
musclé et cest donc avec deux ris et le solent
que je mengage dans les pertuis bretons. Jai naturellement
le courant contre moi et le vent en plein dans le nez. Je
dois donc tirer des bords et là, je trouve lile
de Ré bien plus longue quà laller.
Le Pogo nest pas un bateau qui aime particulièrement
le près. Il ne faut pas trop serrer le vent pour avoir
une bonne vitesse et ajouter à cela la dérive
due à la gîte et le courant contraire, les bords
sont plutôt carrés et je navance pas beaucoup
par rapport au but. Il faut en plus éviter les filets
des pêcheurs qui sont nombreux dans la région
et pas souvent éclairés.
Vendredi 14 juillet 2000
Cest entre minuit et deux heures du matin
que jarrive finalement au sud-est des pertuis bretons
et je commence à remonter en direction de lîle
dYeu. Le vent vient toujours exactement de la direction
où je vais. Je continue donc à tirer des bords
plus ou moins carrés avec un vent fort denviron
25 noeuds et pas mal de houle. Mon mal de mer na pas
passé et jai pas beaucoup mangé, seulement
quelques barres de céréales et une banane mais
je bois de leau.
Afin déconomiser mes pilotes, jessaie une
nouvelle méthode avec des sandows, ca marche assez
bien car le Pogo est très stable au près. Néanmoins,
le cap nest pas le meilleur que lon puisse espérer.
Je mets donc les élastiques uniquement quand je vais
me reposer un moment. Sinon, jessaie de barrer un maximum
afin de remonter le plus possible au vent.
Jai fait 138 milles sur les dernières 24 heures,
et je me rends compte que je narriverai jamais à
temps vers Lorient pour rejoindre le groupe de Pogos qui part
faire la qualification. Cest un peu démoralisant
car cela veut dire que je vais devoir faire les 1000 milles
tout seul. Heureusement, je suis près de lIle
dYeu et le téléphone portable marche.
Cela me permet de pouvoir lire les messages dencouragements
de Muriel et de Jean-Marc.
La route en direction du Raz-de-Sein ne saméliore
pas du tout car je tire toujours des bords. Cest un
peu désespérant car sur le loch javance
avec une bonne moyenne mais sur la carte cest pas terrible.
Enfin, jarrive à prendre un peu le rythme et
jarrive à dormir plus au moins bien. La période
la plus difficile est au milieu de la nuit entre 1 et 4 heures
du matin. Là cest vraiment difficile de résister
de dormir. Mais il faut sortir pour veiller et sassurer
quil ny a pas de cargos sur la route ou que lon
est pas trop proche des côtes car pour linstant
cest un véritable parcours côtier que jeffectue.
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Samedi 15 juillet 2000
Dans la journée, japproche de
Belle-Ile et le vent diminue enfin un petit peu en tournant
du secteur nord. Je passe le cap Oulfar aux environs de
16 heures. Je viens deffectuer dans les dernières
24 heures 116 milles en surface mais sur le fond à
peu près la moitié. Car comme le dit le
dicton, au près cest deux fois la distance
et trois fois lénergie!
A louest de Belle-Ile, le vent devient portant et
je hisse pour la première fois le grand spi. Ca
se passe bien. Il a même un peu de peine à
porter car il ny a pas assez de vent. Ca me permet
juste de me déhaler contre le courant et davancer
en direction du raz-de-Sein. Je fais à peu près
1 heure de spi avant dhisser le génois léger,
le spi étant vraiment trop pointu. Je peux enfin
pour la première fois faire route directe sur la
chaussée de Sein, et là, le moral remonte
nettement. Je parle régulièrement avec Muriel,
ces téléphones me font le plus grand bien
même si je sais que pour elle cela doit être
difficile de me savoir tout seul sur mon petit bateau
en train daffronter les éléments.
Muriel est actuellement en Ardèche chez mes parents
et jai ainsi loccasion de leur parler et jessaie
plus ou moins de les rassurer!
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Dimanche 16 juillet 2000
La nuit du samedi au dimanche est magnifique, très
étoilée avec un léger vent du nord-est
force 3. Je peux faire route directe sur la Chaussée
de Sein , avec juste un écart de route pour éviter
les îles des Glénans. Comme cest du près
et dans des conditions de mer pas trop forte, mes élastiques
barrent mieux que moi car ils absorbent mieux les petites
différences de vent que moi. Jen profite donc
pour me reposer un peu plus et malimenter un peu mieux.
De temps en temps, il arrive que mes élastiques se
décrochent et alors là le bateau tout dun
coup fait un 180°. Cela mest arrivé cette
nuit et lorsque je me suis réveillé en entendant
la voile faire un bruit anormal, jai vu le porte-avion
Foch devant moi éclairé par la lune. Cela ma
fait une impression bizarre. Il devait être au mouillage
en train dattendre ses avions. Jai remis le bateau
dans le bon sens et je suis reparti. Pour le moment, je nai
pas beaucoup rencontré de cargos car je nétais
pas vraiment sur leur route directe. Et cette nuit, les conditions
sont bonnes et avec la pleine lune ou presque il y a vraiment
peu de risque quils ne me voient pas.
Pendant la journée, le vent tourne au secteur nord
et cela mempêche de faire une route directe vers
le Raz-de-Sein. Jai effectué dans les dernières
24 heures 120 milles. A 20 heures 05, je prends la météo
sur France Inter pour savoir à quelle sauce je vais
être mangé pour monter au bateau phare Conningbeg
qui se trouve à mi-chemin entre Cork et Dublin en Irlande.
Cest le troisième point à virer du parcours
imposé.
Le Dimanche soir je mange mon premier repas chaud, des pâtes
évidemment, sans parmesan malheureusement mais avec
de lhuile dolive. Dans la journée, le vent
du secteur nord me pousse à partir au nord ouest et
je me rends compte que je vais passer trop loin du raz-de-sein
et de Ouessant pour pouvoir reparler avec Muriel. Je devrais
donc attendre jusquà ce que je passe aux îles
Scilly ou que jarrive en Irlande pour lui redonner de
mes nouvelles.
La montée se passe toujours au près, dans des
conditions assez clémentes, vent force 2-3, les nuits
sont claires avec la pleine lune et les conditions sont très
favorables pour passer les rails des cargos de Ouessant.
Lundi 17 juillet 2000.
Jai pour la première fois de la pétole,
de la vraie ! De 9 heures du matin a 4 heures de laprès-midi
je fais environ 10 milles et dans les dernières 24
heures je nai fait que 97 milles. Comme sur le lac,
la mer est absolument dhuile. Jai tout essayé:
mis 2 fois le spi pour voir si ca avançait mais en
fait je nai fait que dériver avec le courant
qui me portait vers louest. Je repars finalement aux
alentours de 17 heures avec du vent du NE, mais ca ne dure
pas longtemps. Le vent vire au nord ce qui mempêche
de faire route directe car cest exactement la direction
du bateau Conningbeg! Jécoute toujours la météo
sur France Inter a 20 heures 05 et aussi maintenant sur BBC
4 à 12:04 et cest assez rigolo car les prévisions
pour les mêmes zones ne sont pas identiques. Dans tous
les cas, les deux mannoncent des vents de direction
variable de force 1 à 3. Daprès moi, ils
ne veulent pas se mouiller et dire que cest des conditions
de pétole. En vérité, il y a un anticyclone
qui se situe à louest de lIrlande et la
pression sur mon baromètre est de 1023. Je dois donc
être très proche du centre qui se situe à
1026. Ma proximité du centre de lanticyclone
explique sans doute le peu de vent.
Mardi 18 juillet.
Cest un nouveau jour de pétole. De
8 heures du matin à 23 heures du soir!!! Le pire cest
quil nest même pas possible de dormir quand
cest comme ça car même sil ny
a que très peu de vent le bateau avance à 1
noeud et il faut donc toujours être à la barre
pour aller au moins dans la bonne direction. Jai fait
84 milles dans les dernières 24 heures . La moyenne
narrête pas de descendre. Cest pratiquement
la moitié de ce que jai fait dans les premières
24 heures. Je me rends de plus en plus compte quil me
sera difficile de finir mes 1000 milles à temps, cest
a dire avant de reprendre lavion pour rentrer ! Si cela
continue dans ces conditions, mais bon.. il faut continuer,
je nai plus le choix. Je naurai plus loccasion
de refaire ces milles sur ce parcours obligé avant
longtemps.
Il y a des moments assez rigolos. Par exemple, sur BBC 4,
juste avant la météo, je tombe sur une retransmission
en direct dun match de cricket entre les anglais et
le Zimbabwe. Il faut mimaginer au milieu de la mer sans
vent en train découter les commentateurs anglais
se désespérer de la performance de leur équipe
alors que je ny comprends absolument rien aux règles...
Mercredi 19 juillet
Le vent est finalement revenu et cette fois depuis
le Nord Ouest. Je peux faire route directe sur Conningbeg.
Le vent ma amené tellement à louest
de ma route que je peux mettre le grand spi et javance
vent de travers en direction du bateau phare. Je laperçois
, finalement, aux alentours de 20 heures. Ca fait déjà
un moment que je suivais la côte montagneuse de lIrlande.
Cette fois, je vois le bateau phare Conningbeg devant moi.
Il est rouge, tout rouillé et il abrite plein de mouettes.
Cest un véritable plaisir de le voir. En plus,
jai un signal de réception du téléphone
portable ce qui me permet de rassurer Muriel pour lui dire
que tout va bien et surtout de souhaiter un bon anniversaire
à ma Maman.
A chaque passage de marque, cest la séance photo
obligatoire pour démontrer à la classe Mini
que lon a bien fait le parcours imposé. Cest
assez compliqué car ils demandent de voir sur la même
photo la marque de parcours avec le bateau et le skipper.
Essayez donc en solitaire ! Tout ca nest pas facile
et je nhésite pas à prendre plus de photos
que nécessaire....afin quil y en ait au moins
une de bonne !
Dans les dernières 24 heures, jai fait 95 milles
soit environ 4 à 4,5 noeuds de moyenne, pas terrible
!
Le fait davoir passé cette dernière marque
me donne cependant beaucoup dénergie et me regonfle
le moral. Jai viré le point le plus extrême
du parcours et il ne me reste plus quà rentrer.
Cest donc avec un grand moral que je réattaque
la descente. Muriel est soulagée de mentendre
et de voir que tout va bien même si elle commence à
trouver le temps long. Je sais que pour elle cest encore
plus difficile que pour moi car elle na pas eu de nouvelles
depuis le dimanche.
Jeudi 20 juillet.
Le jeudi matin, à 5 heures , je hisse le
grand spi que je laisserai jusquà 2 heures du
matin de la nuit daprès. Jaccumule donc
des milles en route directe ce qui est très bien. Je
passe entre les îles Scilly et Lands End à 22
heures.
Vendredi 21 juillet
Aux alentours de 2 heures du matin, je commence
à surfer à plus de 10 noeuds sous grand spi.
le vent a pas mal forci. Il est de secteur Est, donc de travers
et trop pointu. Je décide donc daffaler le spi.
Il fait noir et la lune ne sest pas encore levée.
Laffalage savère être sport mais
jarrive à le maîtriser.
Je mets donc le solent et je continue toujours en route directe,
plein sud, sur Ouessant. Pour la première fois, il
y a de la brume et cest pas le bon moment car je suis
en plein milieu des rails de cargo. Le matin, petite visite
de deux ou trois dauphins qui jouent avec moi pendant 2 ou
3 minutes avant de penser que je ne vais pas assez vite pour
eux.
Aux alentours de 7 heures 30, jai sur mon loch passé
la barre des 1000 milles, ça en fera donc bien plus
que cela une fois que jaurai bouclé mon parcours.
La journée du vendredi se passe bien même si
le vent forcit à nouveau. Javance toujours en
route directe et je décide de faire un petit écart
pour passer à lOuest du rail de Ouessant (autoroute
à cargos). Je couperais donc le rail perpendiculairement
pour éviter autant que possible la route des cargos.
Le vendredi soir, vers 22 heures, je suis à la hauteur
de la Chaussée de Sein. Muriel et les enfants sont
chez Denis et Susana et je peux leur parler à tous
pour leur faire part de ma progression. Je commence à
être vraiment fatigué. Ca fait maintenant 9 jours
que je suis en mer et je nai jamais dormi plus que 4
ou 5 heures par jour. Jai en plus mangé du couscous
aux épices orientales qui ma un peu détraqué.
Sans toilettes sur le bateau, il faut bien saccrocher
aux filières !!
Jattaque la nuit du vendredi au samedi avec du vent
qui forcit. Je prends donc 1 puis 2 ris.
Samedi 22 juillet.
Aux alentours de 4 heures du matin, le vent devient
vraiment fort avec un orage et un éclair qui tombe
pas très loin du bateau. Cest à ce moment
là que je commets les deux plus grosses erreurs de
mon parcours. La première est de ne pas avoir préparé
la troisième bosse de ris à lavance. Lorsque
je décide de prendre le troisième ris, cest
extrêmement difficile car les conditions de mer sont
fortes. Après avoir bataillé pendant 1/2 heure,
jarrive finalement à passer la bosse de ris et
là, au lieu de me contenter de rester sous trois ris
et le solent, je me dis tout dun coup que le vent a
nettement diminué et que je navance plus et narrive
pas à passer les vagues et donc je relâche le
ris que jai eu tant de peine à mettre, alors
que le bateau est encore un peu en vrac et les bouts sont
dans tous les sens dans le cockpit. Deuxième erreur,
car sans que je le sache, le guindant était déchiré
à hauteur de la deuxième latte et suite à
leffort de la prise de ris, il est cette fois impossible
de ré-hisser la voile. Je nai donc plus le choix
et je dois affaler complètement la grand-voile et décide
dhisser la grand-voile de cape qui est un triangle de
tissu orange fluo impossible à border. Il est impossible
de faire du cap et jessaye tant bien que mal à
passer les vagues qui sont de face avec 4 à 5 mètres
de creux. A mon avis, il souffle un bon force 8 (la météo
prise à larrivée à Lorient me confirmera
en ayant prévu un coup de vent force 6-7 avec des rafales
possibles à force 9. La girouette et le feu de tête
de mat sont tombés dans le coup de vent. Malgré
cela, je me sens absolument en sécurité sur
le Pogo. Le bateau est très sûr, très
marin face aux conditions de la mer. Je suis très fatigué
car je nai pratiquement pas dormi de la nuit et ces
conditions de vent sont vraiment difficiles. Pour changer,
le vent vient de Lorient et je dois donc tirer des bords!
Aux alentours de 14 heures, le vent faiblit. Je décide
donc de remplacer la voile de cape par la deuxième
grand voile que javais dans le bateau. Malheureusement,
il ny a pas de lattes pour cette grand voile et la voile
ne porte pas très bien. Je ne fais donc pas un bon
cap. Dans laprès-midi, cest lopposé
de cette nuit, il ny a plus dair ! Je change donc
le solent et mets le génois léger. Je commence
vraiment à être un peu désespéré
car je suis à moins de 50 milles de Lorient et je pensais
pouvoir arriver là-bas avant la nuit. Pour finir un
vent léger se lève et je peux remonter la côte
en direction de Lorient. Vers 21 heures 30, jarrive
finalement à lentrée du chenal de Lorient.
Cette fois, il ny a plus de vent du tout, la marée
descendante débute, et pour couronner le tout la brume
se lève et la visibilité ne dépasse pas
50 mètres. En désespoir de cause, jappelle
la vigie de Port-Louis, qui surveille lentrée
de la baie de Lorient, et je lui demande sil est possible
de me trouver un bateau qui puisse me tirer vers le Port de
Kernevel. Il ny a plus quun mille à faire
mais je nai plus le courage dattendre 5 heures,
avant que la marée ne se renverse, pour que je puisse
finalement monter. La vigie me dit quil ne peut que
demander au CROSS et que si je demande assistance je devrais
payer au moins 2000 FF. Cest un peu cher le mille et
je préfère donc attendre 5 heures de temps.
Jessaye en attendant de monter le chenal mais sans beaucoup
de succès. Finalement arrive un grand voilier qui rentre
de Brest 2000. Je crois reconnaître la Cancalaise. Je
les hèle et leur demande sils peuvent me lancer
un bout pour me tirer. Ils acceptent. La manuvre est
difficile car la bôme du mat à larrière
du bateau dépasse de 2 mètres. Cest assez
sport de manuvrer tout à la voile après
10 jours de mer. Jaffale le génois et vais mettre
un bout à lavant. Je borde ma grand voile pour
ralentir un maximum. Après deux ou trois tentatives,
ils arrivent à attraper le bout et me tirent juquà
Port Kernevel où jarrive à minuit et demi.
Ca y est , mon loch indique que jai fait 1217 milles
au total (près de 2250 km). Pratiquement 10 jours dont
8 jours de près. Un bon coup de vent le dernier jour
et des conditions assez fortes les deux premiers jours. Une
bonne expérience mais je suis assez content den
finir.
Je nai malheureusement pas le temps de ranger le bateau
comme je le voudrais car je dois prendre le train le matin
à 9 heures 20 afin de prendre lavion à
Dinard. Je range donc les voiles du mieux que je peux. Comme
javais tout sorti, tout était en vrac dans le
bateau. Le gennaker, le génois léger, le génois
lourd, le solent, la grand-voile et la voile de cape, tout
cela à lintérieur de la petite cabine,
je vous laisse imaginer la place qui me restait ! Je laisse
donc le bateau sous la surveillance du port car je me suis
amarré à lextérieur du port et
leur demande de le mettre à lintérieur.
Chose quil ne feront pas et qui créera de belles
rayures sur la coque de CHILDREN ACTION.
Côté physique, à part quelques égratignures
sur les mains, je me suis fait quelques bleus sur les jambes
mais de façon générale je suis en assez
bonne forme physique. Jai perdu 4 kg en 10 jours. Donc
mesdames et messieurs, si vous voulez perdre du poids, mieux
que la thalasso, je ne peux que vous recommander de faire
10 jours en solitaire sur la côte atlantique. Cest
tout bénéfice pour la ligne.
Côté bateau, le bilan est excellent et je nai
pas connu de gros pépins. CHILDREN ACTION est sain,
très stable et facile à manuvrer en solo.
Dernière petite mésaventure: au moment darriver
à Rennes pour prendre le bus pour laéroport
de Dinard, la gare routière est fermée, il ny
a pas de panneau indiquant à quelle heure vient le
bus et on me dit que sil ny a pas dinformation
sur ce bus il ne viendra pas car aujourdhui cest
dimanche. Pour ne pas rater lavion après tous
ces efforts pour arriver à temps, je loue une voiture
pour aller de Rennes à Dinard. Mais en arrivant à
laéroport et en me renseignant on mindique
que le bus était là, comme tous les jours. Voilà,
cela ma coûté 400 FF au lieu de 40 FF. Mais au
moins, jétais sûr de ne pas rater lavion
et jai pu arriver à lheure chez Lombard
Odier lundi matin !